ALERTE. ALERTE. ALERTE.

LES USAGES DE LA LECTURE SONT EN TRAIN DE CHANGER. LE NUMERIQUE APPROCHE A GRAND PAS. RESTEZ CLOITRES CHEZ VOUS, ET TENEZ VOS ENFANTS DE PEUR QU’ILS NE SE PRECIPITENT DANS LA GUEULE DU MONSTRE.

ALERTE. ALERTE. ALERTE.

Voilà qui serait vraiment idiot.

Mais heureusement, des îlots de résistance parsèment ces terres qu’on croit désolées, des groupes s’organisent, s’aventurent au dehors pour montrer à tous, à tout le monde qu’il n’y a rien à craindre. Plusieurs chefs de files émergent. Parmi eux, Laure Deschamps, journaliste spécialisée dans les usages numériques qui a fondé en septembre 2010, le site de la souris grise, guide des meilleures applications pour les enfants. Fort de son expérience en la matière, elle publie en novembre 2011, « l’enfant et la tablette », un livre qui se veut une analyse critique, nourris de références, sur les usages de la tablette chez la jeunesse.

Cette aventurière entend donner un « coup d’arrêt aux préjugés numériques ». Autrement dit, « soit on regarde passivement [le numérique s’installer dans nos foyers], soit on [l’] accompagne ». Or l’accompagner, c’est le penser. Et se donner les moyens de le penser, c’est dissoudre les vieilles antinomies qui entendent opposer fondamentalement les caractéristiques de la lecture papier et celle de la lecture numérique en débutant l’analyse par un fait très simple, un constat que personne ne peut réfuter. Mettant à part les exigences marketing, les ventes propulsées par les campagnes publicitaires, il est quelque chose qu’on ne peut nier : les enfants du 21ème siècle sont nés l’écran devant les yeux et la tablette sous la main.

L’auteure s’intéresse donc à la relation entre l’enfant et ce « bien étrange plateau ». Celle-ci passe par deux biais : le jeu, et l’apprentissage. En effet, il est une frontière mince entre le jeu et la contrainte lié au processus éducatif chez l’enfant qu’il faut travailler, explorer, comprendre. Et c’est là que tout va se jouer…En témoigne, par exemple, les applications utilisant la pédagogie alternative Montessori pour l’étude du français et des maths.C’est là que réside l’un des intérêts fondamentaux du rapport entre l’enfant et la tablette.

Mais il existe un autre constat dont l’auteure aimerait dérouler les implications. Pour Laure Deschamps, « la vue n’est plus désormais le seul sens sollicité : on voit certes le texte, mais on le touche et on l’entend ». Quelles conséquences ? Que peut-on faire avec ce constat ? Comment cela va-t-il nous servir de manière intelligente ? La société Chocolapp a, par exemple, développée une application d’aide à la lecture ou l’enfant peut choisir d’écouter l’histoire ou de la lire seul. A l’opposé de la vie, nous retrouvons « les lecteurs seniors [qui] semblent ainsi parfois bien moins attachés aux feuilles de papier que leurs petits-enfants » . Et pour eux, l’agrandissement du texte sur la tablette a ceci de pratique qu’il peut pallier à des problèmes de presbytie apparaissant avec l’âge.

Je m’arrête là. L’ébauche que je me suis employé à faire est imparfaite, et n’a pour but que de laisser présager la richesse critique et intellectuelle du livre de Laure Deschamps. Encore quelques mots, et je laisse place à l’auteure. Il semble que le but politique de ce livre ait été d’élaborer une réflexion sur un usage publique de la tablette, c’est-à-dire qui puisse échapper à des intérêts privés, corporatistes et commerciaux. Si la tablette fait quasiment partie du « corps propre » de la jeune génération, pour reprendre l’expression de Merleau-Ponty, il faut se donner les moyens de penser et de dénouer ses implications contre les préjugés numériques. C’est là une tâche philosophique de la plus haute importance que s’est assignée Laure Deschamps, et c’est de cette manière que l’ignorance crasse sera dissoute.

« Que foutaient nos neurones avant l’invention de l’écriture ?, se demande Michel Serres. Les facultés cognitives et imaginatives ne sont pas stables chez l’homme, et c’est très intéressant. C’est en tout cas ma réponse aux vieux grognons qui accusent Petite Poucette de ne plus avoir de mémoire, ni d’esprit de synthèse. Ils jugent avec les facultés cognitives qui sont les leurs, sans admettre que le cerveau évolue physiquement »

1 question à Laure Deschamps :

Quelles sont actuellement vos trois livres numériques Jeunesse favoris ?

L’un de mes grands coups de coeur de 2012 a été le Conte du haut de mon crâne, une belle oeuvre de littérature numérique Jeunesse, éditée par La souris qui raconte. On garde longtemps en tête l’histoire d’Ari Allistair Arx Sorensen, un centenaire qui nous raconte sa vie, entre bonheurs et tristesses intenses. Ce livre mis délicatement en scène, en musique et en voix, est à proposer à partir de 8/9 ans. Pour les tout petits, les 2/4 ans, Le monde de Sam, édité par Avant-Gout Studios, montre comment l’album numérique a évolué positivement : les animations n’y sont pas gadgets, elles soutiennent l’histoire sans en perturber son fil. Enfin, pour leur inventivité et leur douce folie, je citerai les Histoires farfelues, éditées par Tralalere : il s’agit d’une machine à histoires, un griot numérique aléatoire. Assez irrésistible.

 

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mai 9, 2013

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